Au-delà du souverain

Il faut, souverainement, se frayer un passage au-delà du souverain

Les souverainetés qui nous entourent nous étouffent. Il y a celles de l’État, de la nation, des différents pouvoirs qui se croient autonomes; il y a celles des personnes, des chefs, des innombrables variétés de narcissismes; il y a celles des savoirs, des constructions mentales, des commandements. Pour vivre il faut s’en extraire, s’en débarrasser, mais cela implique d’affirmer, en contraste, une autre souveraineté qui n’en soit pas une. Il faut des conditions très singulières pour que puisse émerger cette tension paradoxale. Pour Francis Ford Coppola dans Apocalypse Now (1979), la confrontation est apocalyptique. Entre l’armée américaine, le lieutenant-colonel Kilgore, le colonel Walter E. Kurz et le personnage principal du film, le capitaine Benjamin Willard, il y a conflit de souverainetés, mais tandis que Kilgore et Kurz restent droit dans leurs bottes, Willard hésite, temporise. Incapable de choisir entre sa mission, qu’il voudrait accomplir, et le sentiment qu’il a de ne pas être à sa place, il prend acte de son échec. La poussée souveraine en lui s’est dissociée. D’un côté, elle lui donne la force de continuer son parcours, mais d’un autre côté, il se laisse emporter, passif, par le courant.

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