La Tourneuse de Pages (Denis Dercourt, 2006)
On ne peut se venger que par un fantasme parfait
Il s’agit d’un film sur la vengeance féminine. Mélanie veut se venger d’Ariane, parce que, quand elle avait 12 ans, Ariane lui a fait rater son concours de piano. C’est aussi simple que ça, et les événements se déroulent implacablement.
Le contraste est maximal. Mélanie (belle jeune femme) est fille de bouchers, tandis qu’Ariane (quadragénaire au charme un peu décati) vit dans un monde de luxe. Mélanie n’a qu’un BTS, tandis qu’Ariane est une pianiste reconnue. Mélanie est seule, tandis qu’Ariane est mariée à un avocat célèbre et a un fils lui-même jeune pianiste. Mélanie n’a pas connu l’amour, tandis qu’Ariane est une femme aimée. Mélanie est sûre d’elle, tandis qu’Ariane est fragile.
Quand, dix ans plus tard, Mélanie réussit à s’introduire dans la vie privée d’Ariane, elle inverse toutes ces déterminations. Le film progresse sans souci de vraisemblance, comme si Mélanie réalisait un rêve : détruire de l’intérieur tout ce qui fait la supériorité d’Ariane, son couple, son métier, son statut. Les événements se déroulent comme un accomplissement de désir, sans anicroche, sans défaillance, sans échec.
Mélanie est enfin toute-puissante. Elle maîtrise parfaitement chacun de ses actes. Elle devine la psychologie de tous les autres et personne ne la perce à jour. C’est la perfection du fantasme.