Il est rassurant d’associer la mort à la faute, l’erreur ou l’injustice
Pour des raisons formelles, thématiques, on a rapproché le film d’Oliver Laxe, Sirat, du Salaire de la Peurd’Henri-Georges Clouzot (1953) et de son remake par William Friedkin Sorcerer (1977). Il est vrai que dans les trois films, on voit deux camions traverser des zones dangereuses avant d’être détruits et certains personnages entraînés dans la mort. Mais cette ressemblance thématique masque une polarité fondamentale. Dans Sirat, des personnages sympathiques et innocents meurent sans raison, sans justification, tandis que dans les deux adaptations du livre de Georges Arnaud ce sont des malfaiteurs, des hors-la-loi assez détestables qui sont emportés d’une manière qu’on pourrait dire logique. Dans le premier cas la mort apparaît comme injuste, scandaleuse, tandis que dans le second c’est un acte de justice, compréhensible et acceptable. Dans le premier cas la mort arrive soudainement, sans condition ni raison, tandis que dans le second elle est le résultat d’une biographie, d’une série de conditions. Pour notre équilibre, il est préférable que la mort ait un sens : je suis vieux, ou bien j’ai fauté, ou bien j’ai commis des erreurs, donc je meurs. La mort gratuite est sordide, inacceptable.