« Je suis mort », relance de la vie

En déclarant « Je suis mort·e », je redonne à la vie une autre chance

Dans deux films sortis la même année, Conann de Bertrand Mandico, et La Bête de Bertrand Bonello, un personnage féminin réitère plusieurs fois : « Je suis morte ». Dans les deux cas, ce personnage se substitue à un personnage masculin de la littérature, le Conan de Robert E. Howard filmé en 1981 par John Milius, ou le John Marcher de La Bête dans la Jungle de Henry James filmé, tel qu’arrangé par Marguerite Duras, en 1988 par Benoît Jacquot. Chaque fois le nom est changé : elle devient « Conann » dans le premier cas et « Gabrielle Monnier » dans le second, et chaque fois les deux Bertrand construisent leur film en séquences temporelles successives (six pour Mandico, trois pour Bonello) qui se terminent à chaque fois par la mort du personnage féminin. Et ce n’est pas tout : dans les deux cas, le personnage féminin déclare : « Je suis morte » dans le moment même où, dans le film, elle est encore vivante. Cela intervient dès le début pour Mandico, et dans le cours du récit pour Bonello, mais le résultat est là : déjà verbalement morte, elle meurt encore plusieurs fois, comme si ce n’était pas suffisant. Comment analyser cette concomitance ? On peut partir d’une hypothèse toute simple, basique : à chaque étape, c’est une autre vie qui peut redémarrer. Les femmes auraient, plus que les hommes, cette faculté.

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