Planétarium (Rebecca Zlotowski, 2016)

Au cinéma, la présence des morts est illimitée : on ne peut que les sacrifier, dissimuler leur présence sous d’autres films, toujours plus.

Paris, avant-guerre, vers la fin des années 30. Les sœurs Barlow, Laura1 et Kate2 se retrouvent après une séparation. De passage à Paris, elles se produisent dans un spectacle de spiritisme. C’est Laura qui fait la présentation : « Je voudrais d’abord commencer en m’excusant. Je ne voudrais pas vous décevoir. Nous ne nous révélerons rien que vous ne connaissiez déjà. Nous vous révélerons ce que vous avez perdu : vos morts ». « L’Europe ressemble à un cimetière à ciel ouvert : la terre sous nos pieds est cent fois plus peuplée par les morts que par les vivants. Qu’ont-ils à nous dire ? Nous pouvons leur parler. Êtes-vous prêts à les entendre ? Êtes-vous prêts pour la vérité ? ». Une spectatrice est conduite sur scène, Kate respire profondément, elle réussit à faire parler les morts de la personne choisie. Dans cette association, Laura est la gestionnaire et Kate la medium qui paye son don exceptionnel par un état dépressif et une tendance à l’alcoolisme. Elles semblent avoir des difficultés financières. 

Un producteur de cinéma, André Korben3, se manifeste pour, dit-il, une séance privée. Ce n’est pas le don de voyance qui l’intéresse chez les sœurs, c’est leur talent, leur beauté, leur dimension spectaculaire. Il faut peu de temps à Laura pour se rendre compte que Korben n’est pas né français – petit détail qui, plus tard, aura son importance. Au début de la séance de spiritisme, il ne la prend pas au sérieux, il a l’air de s’amuser. Mais il lui arrive quelque chose d’étrange : il entend des pas, puis son corps se tord, se tend, comme si quelqu’un essayait de l’étrangler par derrière. C’est si intense qu’elles sont obligées d’arrêter la séance. Quand il revient à lui, les larmes ont envahi son visage. Son émotion déteint sur les deux jeunes femmes. « Comment vous faites ça ? » demande-t-il à Kate. Puis il s’endort, il dort profondément. Comme si c’était un rêve, on voit sur l’écran la scène qui l’a tellement impressionné : des pas, une main sur son dos qui lui saisit le front, puis rampe vers la gorge et l’étrangle4

Pendant l’Assemblée Générale de la société que dirige André Korben, les actionnaires sont en colère car ils ne reçoivent pas de dividendes. Korben défend sa stratégie : en période de crise, il faut innover, innover sans cesse, développer autrement le cinéma, même si les résultats ne sont pas immédiats. Quand on connait l’histoire du cinéma français, on comprend qu’André Korben n’est autre qu’un sacrifié de cette histoire, Bernard Natan. Le film est construit à partir de la tragédie qui l’a emporté à laquelle il a fallu ajouter pour les besoins du récit une historiette d’amour. Que le véritable Nathan ou Nathanaël Tanenzapf ait été marié, qu’il ait été père de deux filles jumelles auxquelles il vouait un amour et une fidélité infinie, peu importe, il faut imiter ce que faisait Bernard Natan en tant que producteur, introduire un récit qui fasse vendre, l’histoire des deux américaines passant dans la ville de Paris et décidant d’y séjourner à l’époque du Maréchal. Le vrai Nathan Tanenzapf n’était pas d’origine polonaise mais roumaine, il avait quitté Iași pour la France à l’âge de 19 ans (1906), mais peu importe, il faut qu’un Juif soit polonais et qu’il soit issu d’une famille religieuse. On n’en voudra pas à Rebecca Zlotowski d’avoir succombé à cette tentation, au contraire, car le film ne retranche rien, il vise plus que la rectitude historique : le secret de Nathan en-deçà et au-delà de Natan, car Natan reste Nathan. Il procède par adjonctions, ajouts, suppléments.

Les sœurs Barlow sont prises dans un embouteillage. Que peuvent-elles faire ? Elles n’ont pas assez de séances de spiritisme prévues pour en vivre. Laura propose de renoncer à la prochaine étape en Angleterre, rester en France, s’y installer quelque temps. Justement, Korben leur rend visite à l’hôtel pour leur faire une proposition. Impressionné par la précédente séance et plus particulièrement par l’apparition d’un individu ou d’un spectre qu’il croyait être son frère, il se demande s’il pourrait la filmer (filmer l’apparition, pas la séance). « Je peux vous rendre célèbres à une échelle que seul le cinéma rend possible », dit-il. Il les invite chez lui, elles acceptent. 

Pour qu’il y ait sacrifice, il faut qu’il y ait dette et souci de payer la dette, de la rembourser ou la neutraliser. La dette ici, c’est celle que le cinéma français et plus particulièrement la société Pathé n’ont jamais remboursée à Bernard Natan. En le sacrifiant, ils ont pu penser qu’ils l’avaient annulée – mais le sacrifice n’annule rien. Le nom Korben a été inspiré à Rebecca Zlotowski par le mot hébreu Qorban, superlatif de Qarob (proximité), qui signifie sacrifice. Le sacrifice est le moment de la plus grande proximité avec le sacrifié, proximité si grande qu’on ne la supporte plus. C’est ainsi que Pathé est passé de main en main jusqu’à l’héritier d’une grande famille protestante, Jérôme Seydoux (1990), sans que jamais l’opération sacrificielle de 1939-1942 ne soit considérée comme la source du pouvoir qui sera le sien. Si proche du cinéma, il aura longtemps ignoré le sacrifice inaugural.

André Korben, qui n’oublie jamais que son métier est de produire des films, propose aux sœurs de jouer dans une nouvelle production. Kate restant, comme toujours, en retrait, c’est Laura, la plus belle, qui s’impose pour ce film dans lequel doivent se concrétiser des apparitions5. Ignorant que le projet caché d’André Korben est d’introduire dans le film de véritables apparitions qui auraient été filmées, les techniciens proposent des trucages, mais il refuse. Des images non truquées de phénomènes paranormaux, personne n’a jamais vu ça, dit-il. S’il y croit, c’est parce qu’il les a lui-même ressenties, expérimentées, perçues comme réelles. Il ne peut pas imaginer que les autres ne partagent pas, ne puissent pas partager son vécu6

En inventant cette invraisemblable histoire d’apparition réelle des morts, les scénaristes semblent trahir un Bernard Natan qui, du cinéma sonore au grand luxe des salles, s’est rarement trompé dans ses innovations. Dans le camp d’Auschwitz-Birkenau où il a encore pu écrire une lettre à sa famille au début de l’année 1943, à quoi pensait-il ? Se demandait-il ce qu’il était advenu de son père, sa famille d’origine, se disait-il que leur effacement dans sa vie n’était que l’anticipation de son propre effacement dans le cinéma français ? Il aura, certes, sacrifié son passé pour construire une entreprise qu’on lui aura confisquée. L’erreur d’André Korben, une erreur majeure que Bernard Natan n’aurait pas commise, c’est de croire en la possibilité de réellement saisir ces souvenirs que sa nouvelle vie et son changement de nom auraient dû abolir. Il peut y avoir un cinéma du réel, un cinéma documentaire, mais le réel comme tel, on ne le saisit jamais, il reste hors-champ. La circonstance tragiquement atténuante, c’est qu’en arrivant sur la rampe de la chambre à gaz, Nathan Tanenzapf pouvait légitimement croire que l’invraisemblable était devenu réalité.

Film dans le film. Sous le titre « Apparition fatale », c’est une histoire d’amour impossible. Laura joue le rôle d’une spirite dont un jeune veuf tombe amoureux. Ils s’aiment, mais tous deux pensent à la femme défunte. Malgré leur amour, cette morte reste un obstacle entre eux, un obstacle réel. Les morts n’ont pas besoin d’agir pour produire des effets. De là où ils sont, absolument immobiles, ils ont plus de pouvoir que les vivants. Laura rêverait de réussir dans la vie, de devenir actrice, mais elle est mal à l’aise. Quand elle joue, elle a l’impression que c’est une autre qui joue, et quand elle participe aux réjouissances et aux fêtes du petit monde superficiel de la vie parisienne, elle est comme une pièce rapportée aux côtés de Kate, qui n’y a aucune place et compense sa solitude par l’alcool. André propose une séance, tout de suite, pendant laquelle il semble avoir une érection que Laura interprète comme un désir, un désir pour elle, et quand le lendemain matin, Kate confie à sa sœur : « Tu sais, ce n’est pas son frère », Laura néglige cette confidence qui implique que l’essentiel ne se joue pas avec elle, mais entre Kate Barlow et André Korben. Kate est le pendant d’André : le monde les tolère, mais ils restent des éléments extérieurs, inintégrables, des cailloux dans la chaussure. Cette extériorité, le texte du film la présente comme le don, l’aptitude ou le devoir de dialoguer avec les morts. Mais si Kate, la jeune voyante passive, et André, dont la vie n’aura été qu’une surenchère illimitée, ont entre eux un lien direct, à la fois étrange, indissoluble, sexuel et asexué, c’est parce que depuis le commencement du film, ils ont déjà dit oui à une exigence externe dont ils ne savent que peu de chose, presque rien. 

Une nuit, Laura entend des bruits, une respiration forte, sonore. Kate et André sont en pleine action spirite, sans elle. « Combien de fois as-tu fait cela seule avec André ? » Kate répond : « Tu es jalouse ». Laura la gifle. Elle n’a rien compris à ce qui se passait entre Kate et André. Déçue, elle espère se distraire en revenant à la vie mondaine (les courses de chevaux). Elle y retrouve Jean, le réalisateur. On chante la Marseillaise (en contrepoint, chacun pense à la situation politique de l’autre côté du Rhin et des Alpes). Mais Laura n’arrive pas à quitter André Korben, elle reste avec lui. Il y a dans l’historiette une histoire de couple, de dispute entre sœurs et de jalousie, et il y a aussi l’entrée en scène du professeur Ulé, spécialiste en métapsychologie, qui prétend avoir mis au point une machine capable de saisir des échos très lointains du passé, comme on retrouve des fossiles. Et voici Laura, Kate et André devenus, par la décision du sacrifié, les cobayes d’un inventeur fou7.

André Korben ne sait pas ce qu’il cherche. Tout se passe comme si son désir était transféré dans le film, mais le film n’est qu’un film, il y a en lui une résistance, une impuissance qui appelle un complément, un supplément, un appoint technique. Pour éviter l’inconvénient des trucages, il faut un autre artefact. Ce sera le professeur Ulé, ce quasi-charlatan qui prétendra l’aider à exploiter le don spirite de Kate. Par cette tentative, André avoue son côté sombre. Au lieu de respecter le don de Kate, sa donation gratuite, au lieu de la reconnaître comme telle, de la protéger, de s’en faire le gardien, il s’en sert. Sa faute, aussi impardonnable qu’inéluctable, ce n’est pas celle que les actionnaires de Pathé-Natan lui ont reprochée, c’est ce détournement. Bernard Natan a beaucoup donné au cinéma français, et ce don que presque personne n’a reconnu est masqué par une réussite sociale excessive, un triomphe de la circulation.

Ils sont au bord de la mer. Le tournage est retardé. Laura a une relation avec Louis, un autre garçon. Ils couchent ensemble. Louis lui montre un film pornographique dans lequel Korben est supposé tourner . « Tu vois bien que c’est pas lui ! » dit-elle . « Pourquoi tu fais ça, pourquoi tu cherches à lui faire du mal ! » Elle le vire. « Va-t’en, dégage ! » Pendant ce temps, Kate et Korben continuent leurs séances de spiritisme. Korben ne sait pas qui est cet homme qui lui apparaît pendant les séances. Kate dit : « Tu sais, on pense qu’on fait revenir des gens qui ont compté pour nous. C’est l’opposé. Les fantômes, c’est des gens pour qui on a compté, et qu’on n’a jamais regardés, parce que ça ne nous dit rien du tout. Ils reviennent parce qu’ils n’en ont pas fini avec nous ». La phrase de Kate sonne comme le dévoilement d’un secret : ce ne sont pas les vivants qui appellent les morts, ce sont les morts qui appellent les vivants. Sans cet appel, les séances de spiritisme ne pourraient pas réussir, rien ne pourrait s’extraire de la crypte. Celui qui reçoit l’appel ne peut pas lui être indifférent, il ne peut qu’acquiescer, sans savoir que ce qui remonte à la surface n’est pas son souvenir à lui mais le souvenir d’un autre, qui laisse en lui une marque inqualifiable, indescriptible. Lors des séances de spiritisme, André n’a pu dire « oui » que parce que, déjà, le « oui » de l’autre l’avait précédé. 

Le professeur Ulé essaie sa machine sur Kate, qui tient la main de Korben. Celui-ci, habillé en militaire, voit un autre soldat marcher, des pas militaires sur le sable. Son père, vieux juif barbu, marche au bord d’un lac puis récite une prière. « C’est là que tu es ? » dit-il en yiddish à son fils qui avait combattu pour la France. « Tu as l’air d’un vagabond. C’est tes amis, eux ? Ta nouvelle famille ? Tu n’as plus de famille. La prière était pour ta mère. C’est sale ici. Aide-moi ! Tu n’es jamais là quand on a besoin de toi. Je rentre à la maison. On se reverra. ». Puis André se revoit enfant devant la cage aux lapins. C’est la guerre. La machine du professeur Ulé s’emballe, un véritable incendie, il faut retirer le casque de Kate. « Ça va » dit-elle, avec un petit sourire malicieux8. Arrivant devant son miroir où elle doit se préparer pour une prise de vue, Laura voit un graffiti : « La pute du juif », écrit au rouge à lèvres. Tout le monde la regarde, droit dans les yeux (regard-caméra). Elle comprend tout de suite ce que signifient ces regards, et avertit André : il faut qu’il soit prudent. Mais André ignore la prudence. Encore une autre fonction du regard-caméra : la menace, la haine. L’avertissement n’aboutit pas directement à son destinataire, il passe par un tiers.

André Korben est tellement absorbé par sa quête, tellement persuadé d’avoir franchi un pas inouï, unique, qu’il ne pense ni à l’antisémitisme, ni aux manœuvres de ses actionnaires. Heureux, confiant, d’une imprudence aveugle, il présente à tous le film où il croit percevoir sa propre vision. Quelque chose passe effectivement sur l’écran : une sorte d’ombre furtive, brouillée, informe, indéterminable. Il sourit, il croit tenir la preuve de son succès, il imagine que les autres seront aussi convaincus que lui, mais la déception se lit sur leurs visages. Pour tout autre que lui, à l’exception de Kate, il n’y a presque rien. « C’est très sous-exposé, je ne vois pas ce qu’on va pouvoir faire de cette image » dit le président. Korben a dépensé les deux tiers du budget pour financer cette caméra qui ne montre que la trace illisible de ses souvenirs enfouis. Les revenants ne se sont adressés qu’à lui, seules les sœurs Barlow peuvent encore le comprendre, sa solitude est absolue. On le force à démissionner. Retour à l’histoire de Bernard Natan : on l’accuse de mauvaise gestion, on lui reproche ses manipulations financières, son argent étranger, on lui rappelle son vrai nom, Korbinsky. 

Korbinsky le voyou n’est plus André Korben ni Bernard Natan, il est redevenu Nathan Tanenzapf, le nom de ce qui se retire du cycle, échappe au sacrifice rituel. Il est détruit, mais sa destruction n’est plus mise au service de la répétition, de la sécurité de l’échange et de la dette organisée. Le destin de Nathan, comme celui de Kate, excède cette circularité. Si l’historiette insiste tellement dans le film, avec ses anecdotes (histoires d’amour ou de jalousie, calculs contrariés, petites joies et grandes détresses) et ses détours, c’est pour sauvegarder la visibilité du film, le retour classique des schèmes narratifs. Mais le fond sans fond du film déborde le film. L’œuvre de Bernard Natan continue à hanter le cinéma français, il empêche la clôture du sacrifice. 

Les séances de spiritisme, c’est terminé. Le réalisateur décide d’abandonner le film. Il n’a plus confiance en Korben. « Il n’y a rien sur ces images, André, rien, tu dérailles complètement, et le pire c’est que tu ne t’en rends pas compte. André, réveille-toi ». Laura est devenue actrice, elle veut en faire son métier, et elle voudrait faire de Kate une fille normale. Mais Kate n’est pas plus normale qu’André. En entendant dire qu’on veut la normaliser, elle s’évanouit, du sang coule de son oreille. Laura appelle à l’aide. C’est une jeune fille déscolarisée, sujette à des crises d’angoisse. Il faut qu’André lui récite un poème pour qu’elle se calme. Elle se croit mourante. « Je ne veux pas mourir, mais je suis en train de mourir. Ne sois pas triste. Tu sais, je ne vais pas mourir à cause des séances. C’est parce que je vais mourir, et je l’avais, le don. J’ai rendez-vous avec les fantômes », dit-elle à sa sœur. Mais le temps n’est pas encore arrivé, Kate ne meurt pas tout de suite. Quand la police vient arrêter André Korben, les deux sœurs, bien vivantes, sont toujours là. Devant cette arrestation absurde, tous trois sont pris d’un fou rire que les policiers se sentent obligés, eux aussi, de partager9

Le jour de son procès : « Qu’est-ce que c’est que ça ? Mais, vous fermez ça, vous ne me filmez pas. Vous ne filmez pas Monsieur, non non non non non non, je ne suis pas en train de jouer là, c’est pas de la comédie, c’est de la tragédie, alors vous ne filmez pas ! Vous ne filmez pas, vous ne filmez pas ! Arrêtez de filmer ! Arrêtez de me filmer ! Arrêtez ! Ne me filmez pas ! » Ce n’est pas le cinéma qui est rejeté par Natan, ce sont les historiettes, ces tristes banalités dont l’arrestation et le procès font partie . Ce moment ne mérite pas la pellicule, tandis que le moment suivant, Auschwitz, l’interdit. 

Plus tard, Laura va voir Korben en prison. Kate a été placée dans un institut à Biarritz. Korben espère toujours qu’il va s’en tirer. Il a perdu sa nationalité française, mais croit toujours en la justice. Il ne comprend pas la haine dont il est l’objet. Il sourit. Il a rêvé qu’il allait se marier avec Laura, que les invités ne sont pas venus, et qu’il a dû payer pour des figurants. Ils riaient, ils riaient, ils s’embrassaient, tandis que l’orchestre jouait un air de son enfance. La suite est encore plus normale : mort de Kate, Laura jouant dans un film (encore un film dans le film) où l’on voit des étoiles filantes. « Demain va être une journée magnifique ». Pourquoi avoir choisi ce titre, Planetarium ? Les personnages seraient des planètes exerçant un pouvoir d’attraction sur la caméra. Ou encore : le dispositif cinématographique se substituerait au cosmos. Admettons. André Korben ignore que le sacrifié, c’est déjà lui, mais il devine que, pour ce qu’il a à faire, un second sacrifié est nécessaire : Kate. L’ellipse du film, c’est qu’il faut absolument tourner autour de ces deux centres pour que la voix d’un tiers, inconnu, vienne au jour. Ce tiers, nous supposerons que c’est le cinéma lui-même.

  1. Interprétée par Natalie Portman. ↩︎
  2. Interprétée par Lily-Rose Depp. ↩︎
  3. Interprété par Emmanuel Salinger. ↩︎
  4. Les disparus ne vous tirent pas vers la mort. Ce qu’ils veulent, en général, c’est se servir de vous pour revenir à la vie. ↩︎
  5. Rien n’aurait été possible si les sœurs Barlow n’avaient pas été si belles – mais c’est de l’ordre du dispositif, de la narration inventée par les scénaristes. ↩︎
  6. Truquées ou pas, effectives ou hallucinées, ce sont toujours des images. Une image est une image, et une image est toujours aussi réelle que fictive, toujours aussi fictive que réelle. ↩︎
  7. Le mouvement du pas au-delà aurait dû les conduire, mais un autre mouvement est venu l’arrêter, l’interrompre. ↩︎
  8. Quand il survient, le dibbouk est inattendu, dévastateur. Plus d’un film en a rendu compte, ceux de Michal Waszyński (Der Dybbuk, 1937), de David S. Goyer (Unborn, 2008) ou des frères Coen (A serious man, 2009) (entre autres). ↩︎
  9. Ils ont raison, il vaut mieux en rire, mais pas d’un rire nerveux comme le leur, pas d’un rire communicatif aussi faux, dérisoire, indu que l’enfermement imposé à Bernard Natan. Il faut en rire d’un rire intérieur, solitaire, invisible. ↩︎
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Pierre Delain

Initiateur et auteur du blog "Cinéma en déconstruction"

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