The Substance (Coralie Fargeat, 2024)
Une substance pharmacologique peut effacer les stigmates du vieillissement, mais quand sa duplicité s’exhibe en public, alors elle fait exploser le lien social
Une substance pharmacologique peut effacer les stigmates du vieillissement, mais quand sa duplicité s’exhibe en public, alors elle fait exploser le lien social
Il faut, pour sauver le cycle répétitif de la vie, abolir tout événement qui viendrait le perturber, au risque de déclencher un événement plus grave encore, plus destructeur encore
Aux lettres d’amour maternelles, elle répond par la plus impersonnelle des répliques : une longue video postale
Il faut, pour porter la tristesse d’une fin d’amour, en garder la trace, l’archive, par une célébration
Un avenir qui se voudrait inconnu (X), brillant, qui, sans craindre la répétition cauchemardesque de cruautés passées, pourrait ajouter autre chose, imprévisible
Exhiber, par la mise en jeu d’un corps nu, les ressorts cachés d’une soumission qui épuise la personne, la vie sociale, anéantit l’avenir
« Il faut porter l’autre », un commandement amoureux, indispensable, irréalisable, indéfiniment répété, impossible et nécessaire
Il n’y a dans le monde que des marionnettes identiques à la voix identique, sauf dans un moment d’exception, unique, déstabilisant, irrépétable.
Il faut, pour survivre, prendre tous les rôles, se déguiser jusqu’à épuisement.
Notre monde s’efface, s’arrête, ce qui arrive est obscur, inconnu, absolument indéterminé.
Il aura fallu, pour que le fils prenne la place de l’antéchrist, carboniser le père, décapiter les femmes, réduire le logos en cendres.
« Pour te venger, effacer tes dettes, il faut que tu t’en souviennes, même si, dans la pure présence, tu ne peux te souvenir que de rien ».
Il n’y a pas de limite au parasitage, pas de ligne protectrice qui ne puisse être franchie.
Pour accéder aux souvenirs, il faut pousser toujours plus loin le mouvement de la mimesis, multiplier les dédoublements.
Monstrueuse la tragédie d’un fils naturel dont on attend qu’il assassine une mère déjà morte, un père déjà suicidé, au prix de sa vie.
S’arrêter sur le pont qui mène au fantasme, au rêve, en passant par la photographie.
S’auto-punir en s’emparant, par un geste de cruauté impardonnable, de la poupée perdue d’une petite fille abandonnée.
Dans un film-cauchemar, la petite fille se retire après avoir payé le prix des blessures, des cicatrices, des souffrances que les autres se sont infligées.
« Il faut que je te porte », dit la terre, et tu répéteras le cycle.
En disparaissant, elles suspendent le monde dans lequel le film s’inscrit – sans laisser aucun indice sur l’autre monde.