Fallen Angels (Un crime passionnel, Otto Preminger, 1945)
Je vais le soutenir, le porter, car je sais à l’avance où cela le conduira – à la neutralisation de ses fautes, au mariage
Je vais le soutenir, le porter, car je sais à l’avance où cela le conduira – à la neutralisation de ses fautes, au mariage
Réduite à la nudité du cycle vital, l’expérience cinématographique ne débouche sur aucun monde
Une errance à la poursuite de sa descendance jusqu’à la perte totale d’identité, le néant
Il faudrait, pour se dissocier légitimement du monde, être un poète exceptionnel, unique – celui qui n’en est pas digne est rejeté, méprisé
Une nuit de chaos qui, en définitive, ne change rien – car jamais le héros ne se détache de la faute
Pour continuer à vivre, il faut renoncer à poser la question : « Pourquoi ? »
Nous sommes affectés par une culpabilité originelle, irréparable, qui ne peut être ni compensée, ni sanctionnée
Fuir par le voyage ouvre sur une extériorité factice : parodie du tourisme filmé, circularité, plaisir du pastiche, répétition de soi qui mène à l’effacement
Où la contrainte économique et le pur plaisir (anéconomique) se confondent dans la même démesure, la même circularité fantasmagorique, qui est celle du cinéma
Entre deux gardiens de l’inconditionnel, la rencontre est aussi fatale qu’impossible.
Déjà en deuil de lui-même, il anticipait sa seule survie possible : résister, par un film, à la pulsion de mort
Un film qui, pour se faire Œuvre de cinéma, doit être lu, entendu, expliqué, transmis, interprété, admiré.
Un Christ déjà mort, sacrifié avant même sa naissance, anéantit l’avenir.
Je suis double mais l’autre en moi, mon jumeau, est déjà mort » – un dédoublement qui ne franchit pas la limite du « deux.
Il faut, pour survivre, prendre tous les rôles, se déguiser jusqu’à épuisement.
Un jour vide, désespéré, point d’aboutissement d’un monde et d’un cinéma sans contenu ni transmission.
il y a dans ce film quelque chose de nazi : l’entrée en scène d’un monde absolument dépourvu d’avenir
Où le cycle de la dette est corrompu, ruiné, asservi aux commerces de la drogue et du cinéma.
Mal radical : un pouvoir qui oblige à décliner son identité, jusqu’à la perte totale du nom.
La version hip hop du lien communautaire (Geschlecht), son empoisonnement, sa corruption et sa dislocation.
Au cinéma, il est impossible d’interpréter sa propre mort, mais on peut toujours la jouer.
Quand disparaît la prophétie, l’espoir d’un monde à venir, alors disparaissent avec elle l’accueil de l’autre, l’hospitalité, la fraternité.
Monstrueuse la tragédie d’un fils naturel dont on attend qu’il assassine une mère déjà morte, un père déjà suicidé, au prix de sa vie.
Où l’on laisse à voir et entendre que tout film est fondé sur le sacrifice de la femme par des morts-vivant.
Là où ça décide, dans l’avenir, bénédiction et malédiction se confondent.
Derrière le regard circulaire du système des médias, il y a des pleurs – impossibles à cacher, étouffer, réprimer, arrêter, surmonter.
En disparaissant, elles suspendent le monde dans lequel le film s’inscrit – sans laisser aucun indice sur l’autre monde.
Où une fiction circulaire scelle l’alliance autobiographique du cinéma avec un « je ».
Quand, dans l’échange d’argent, rien n’est « normal », rien n’est impossible, pas même l’événement qui change les règles.
Avec la perfection du film muet, convergent l’apologie de l’amour et celle de la beauté adhérente en art.