Fitzcarraldo (Werner Herzog, 1982)
Où la contrainte économique et le pur plaisir (anéconomique) se confondent dans la même démesure, la même circularité fantasmagorique, qui est celle du cinéma
Où la contrainte économique et le pur plaisir (anéconomique) se confondent dans la même démesure, la même circularité fantasmagorique, qui est celle du cinéma
Entre deux gardiens de l’inconditionnel, la rencontre est aussi fatale qu’impossible.
Déjà en deuil de lui-même, il anticipait sa seule survie possible : résister, par un film, à la pulsion de mort
Un film qui, pour se faire Œuvre de cinéma, doit être lu, entendu, expliqué, transmis, interprété, admiré.
Un Christ déjà mort, sacrifié avant même sa naissance, anéantit l’avenir.
Je suis double mais l’autre en moi, mon jumeau, est déjà mort » – un dédoublement qui ne franchit pas la limite du « deux.
Il faut, pour survivre, prendre tous les rôles, se déguiser jusqu’à épuisement.
Un jour vide, désespéré, point d’aboutissement d’un monde et d’un cinéma sans contenu ni transmission.
il y a dans ce film quelque chose de nazi : l’entrée en scène d’un monde absolument dépourvu d’avenir
Où le cycle de la dette est corrompu, ruiné, asservi aux commerces de la drogue et du cinéma.
Mal radical : un pouvoir qui oblige à décliner son identité, jusqu’à la perte totale du nom.
La version hip hop du lien communautaire (Geschlecht), son empoisonnement, sa corruption et sa dislocation.
Au cinéma, il est impossible d’interpréter sa propre mort, mais on peut toujours la jouer.
Quand disparaît la prophétie, l’espoir d’un monde à venir, alors disparaissent avec elle l’accueil de l’autre, l’hospitalité, la fraternité.
Monstrueuse la tragédie d’un fils naturel dont on attend qu’il assassine une mère déjà morte, un père déjà suicidé, au prix de sa vie.
Sexe et pouvoir, à l’état nu, exhibent sans fard leur complicité.
Où l’on laisse à voir et entendre que tout film est fondé sur le sacrifice de la femme par des morts-vivant.
Là où ça décide, dans l’avenir, bénédiction et malédiction se confondent.
Derrière le regard circulaire du système des médias, il y a des pleurs – impossibles à cacher, étouffer, réprimer, arrêter, surmonter.
En disparaissant, elles suspendent le monde dans lequel le film s’inscrit – sans laisser aucun indice sur l’autre monde.
Où une fiction circulaire scelle l’alliance autobiographique du cinéma avec un « je ».
Quand, dans l’échange d’argent, rien n’est « normal », rien n’est impossible, pas même l’événement qui change les règles.
Avec la perfection du film muet, convergent l’apologie de l’amour et celle de la beauté adhérente en art.