Pulp Fiction (Quentin Tarantino, 1994)
Un film qui crée son propre monde qui n’est pas un monde, mais un montage cinématographique de situations, de citations et de dialogues, pour le salut du cinéma et de ses personnages
Un film qui crée son propre monde qui n’est pas un monde, mais un montage cinématographique de situations, de citations et de dialogues, pour le salut du cinéma et de ses personnages
Il ne reste du naufrage du politicien que la trace d’un cri, le deuil de la vérité, de la confiance
Fini de jouer! Sans chez soi ni extériorité, sans passé ni avenir, plus rien ne protège de la cruauté du monde
Il est dangereux de s’exposer au secret d’autrui, et encore plus dangereux de vouloir y intervenir
On ne peut photographier, dérober les images d’autrui, les interpréter, sans engager sa responsabilité, sans mettre en jeu sa culpabilité
N’étant rien, le Joker peut tout représenter : le bien comme le mal, le rire comme les larmes, il est le « pharmakon » qui symbolise le chaos comme la justice, le crime et sa réparation
Il faut, pour sauver le cycle répétitif de la vie, abolir tout événement qui viendrait le perturber, au risque de déclencher un événement plus grave encore, plus destructeur encore
Ce qui, en-dehors de toute règle, s’interpose dans les brèches de la famille, du lien conjugal, est brutal, excessif, traumatisant, destructeur
Entre la violente affirmation d’une souveraineté démesurée et la renonciation passive à toute décision, il y a complicité, voire équivalence, dont on ne peut s’extraire que par l’exigence d’un recul, d’un retrait
L’écran n’est pas extérieur au corps : il le parasite, le colonise, le soumet, le remplace, y ajoute toujours plus de dépendances et de sensations, et enfin survit à sa mort
Pour transgresser sans limite les lois et normes courantes, la violence nazie prend appui sur une autre violence, familiale, qui laisse libre cours à toutes les perversions
Il y a en moi une violence élémentaire, incontrôlable, qui me fait haïr le lieu où j’habite, ma famille; ne pouvant y échapper, je n’ai pas d’autre choix que le meurtre
Un avenir qui se voudrait inconnu (X), brillant, qui, sans craindre la répétition cauchemardesque de cruautés passées, pourrait ajouter autre chose, imprévisible
Une force inconnue, difficilement descriptible, confère à certains actes de certaines personnes une extériorité unique, une capacité à se distinguer du commun, à faire événement
Pour remédier à des violences insupportables, des blessures irréparables, il faut un amour sauvage, hors norme, inconditionnel et illimité
Où la lesbienne enfle, enfle, et d’érection en érection, se dresse comme un phallus, éjacule fantasmatiquement et s’endort
Un sentiment de culpabilité, enfermé dans un cycle de dette incontrôlé, peut conduire à l’injustice la plus radicale, effacer tout autre désir, toute autre éthique
Ce qui reste de paradis (perdu, oublié par les humains) ne survit que par la corruption et la mort, à travers le sang que prélèvent les héritiers (Adam & Eve)
Nul n’est épargné par l’impardonnable; il engendre une dette infinie, irréparable, que rien ne peut atténuer
Amalgamer les ingrédients les plus usuels du cinéma pour forclore toute interprétation rationnelle.
Tuer pour procurer un héritage à son fils, dans le monde absurde des gangsters, c’est mourir vivant.
Il aura fallu, pour entendre le secret dont l’autre témoigne, en passer par un « Je suis mort »
En photographiant ceux qu’on aime, on les tue, et ce meurtre déclenche une cascade de culpabilité, de folie et de mort
Aucun mur, aucune indifférence, aucun déni, aucune stratégie d’évitement, ne peut empêcher la contamination par la cruauté, le meurtre de masse.
Par les brèches de la famille, les fissures de la communauté, s’insinue une extériorité irréductible.
« No more money, no more sex, no more power, no more future » – Il n’en faut pas moins pour interrompre le cycle.
Vous êtes tous des criminels, je veux bien vivre parmi vous, mais je ne vous ferai pas d’enfants.
Il faut, pour surmonter sa culpabilité, faire l’expérience de l’impossible.
N’étant ni mort ni vivant, le disparu ne s’efface jamais; nul ne peut limiter sa présence, ni empêcher qu’elle se renouvelle.
Trouver le coupable, c’est impossible, mais ne pas trouver de coupable, c’est intenable, insupportable.
« Pour te venger, effacer tes dettes, il faut que tu t’en souviennes, même si, dans la pure présence, tu ne peux te souvenir que de rien ».
Quand le mal radical répond, c’est dans la langue intraduisible d’un sacrifice terrible, inaudible, impardonnable
Pour résister aux pulsions de mort, de cruauté, il faut la pure gratuité de l’ornement féminin.
Qui parasite l’autre prend le risque d’être parasité par l’autre.
Dans l’acte du criminel comme dans l’expérience du cinéma, il faut dominer l’image, la cadavériser, pour jouir du regard.
Pour se sauver, il faut affronter l’impardonnable.
Insensible, muette, masquée, sans cause ni raison, la figure du mal s’en prend prioritairement à sa propre famille.
Pour prouver la théorie freudienne qu’il enseigne, le professeur fait un rêve qui parodie cette théorie, en même temps qu’il parodie le film noir.
Pour un crime sans borne ni mesure, il n’y a pas d’expiation ni de compensation possible.
Il aura fallu qu’elle soit réduite à la fixité d’un portrait, prise pour morte, pour qu’elle rencontre enfin l’homme pur, intègre : le policier.
Quand la mise en acte d’une justice inconditionnelle, non négociable, appelle une solidarité sans réserve.
Tenter de réunir des fraternités irréconciliables sans les contester de l’intérieur conduit à la paralysie, la tragédie, l’autodestruction.
Il aura fallu passer par l’expérience du porno, l’épreuve de l’horreur, pour enfin vivre autre chose que la vie courante : vivre plus que la vie
À une exigence de fidélité venue d’ailleurs, des ascendants ou d’Afrique, on ne peut répondre que par un sacrifice, ou à défaut en pleurant.
Il faut, pour donner au film un poids de pensée, de réel, mettre en scène la non-réponse de l’autre.
Dans le secret de la crypte, l’amour inconditionnel conduit à l’auto-sacrifice, au retrait, au salut.
Quand s’effondrent les limites, les parerga, rien ne peut arrêter la violence originelle, inouïe.
La pure souveraineté du mal radical, sans justification ni explication, face à la pure souveraineté du rejet de la peine de mort.
Une pure amitié qui ne repose sur aucune justification, sur aucun intérêt commun.
Aporie de l’amour inconditionnel : en exigeant le sacrifice de tout autre intérêt, il se soumet à une condition irréalisable, mortifère.