La Fièvre du Samedi Soir (John Badham, 1977)
Pour aller plus loin, au-delà du pont, il aura fallu qu’il se vide, qu’il évacue la charge mentale du narcissisme et de la danse qui entravait sa marche
Pour aller plus loin, au-delà du pont, il aura fallu qu’il se vide, qu’il évacue la charge mentale du narcissisme et de la danse qui entravait sa marche
Il est dangereux de s’exposer au secret d’autrui, et encore plus dangereux de vouloir y intervenir
L’écran n’est pas extérieur au corps : il le parasite, le colonise, le soumet, le remplace, y ajoute toujours plus de dépendances et de sensations, et enfin survit à sa mort
Un avenir qui se voudrait inconnu (X), brillant, qui, sans craindre la répétition cauchemardesque de cruautés passées, pourrait ajouter autre chose, imprévisible
Transformer son identité, brouiller les genres, cela n’efface ni la faute ni la dette, mais cela peut ouvrir, pour d’autres, un « pas au-delà », une épiphanie
Pour remédier à des violences insupportables, des blessures irréparables, il faut un amour sauvage, hors norme, inconditionnel et illimité
« Je suis mort », dit-il en annulant tout engagement, tout devoir, toute dette, y compris la promesse amoureuse de celle qui voudrait le rejoindre en offrant, elle aussi, « ma mort »
Porter l’autre, en prendre le deuil, dans l’espoir de donner à ce qui aura été vécu une signification supplémentaire<<<;
On ne peut poursuivre la quête aporétique, chercher à posséder ce qu’on sait ne pas pouvoir posséder, qu’avec l’appui crypté de la religion.
Engagé·e dans la barbarie, je dois me venger contre moi-même jusqu’à l’étape ultime où « ma mort » emporte tout, y compris l’art, l’œuvre
Enfermement et décrépitude sont indissociables; avec la clôture des frontières, toujours plus impérieuse, la déchéance ne peut que faire retour.
Il aura fallu, pour entendre le secret dont l’autre témoigne, en passer par un « Je suis mort »
À travers ses manifestes, l’art en personne déclare : « Sauf l’art, rien ne peut être sauvé »
Un Christ déjà mort, sacrifié avant même sa naissance, anéantit l’avenir.
Pour échapper au jugement, il ne suffit pas que l’autre prenne sur lui tout le poids de la faute.
L’ange vivant de la mort appelle le photographe, il lui donne accès à un monde sans deuil, ni devoir, ni dette.
On ne peut répondre à la cruauté, inexplicable et injustifiable, que par un au-delà de la cruauté, tout aussi inexplicable et injustifiable.
L’innocence exige une réparation aussi grandiose ou monstrueuse que la faute – et aussi le retour à l’ordre et à la loi.
Pour se sauver soi-même, il est préférable de pardonner : punir l’autre, ce serait se punir soi-même et s’interdire la transgression
Il aura fallu, pour que le fils prenne la place de l’antéchrist, carboniser le père, décapiter les femmes, réduire le logos en cendres.
Tragi-comique, scandaleux, imparable et inéluctable, l’événement sacré qui fait de Dieu une femme.
Par la grâce d’une amnésie purificatrice qui annule les fautes, innocente, immunise du passé – on peut recevoir le pardon.
Puisque le monde ne répond plus, je ne peux l’interroger qu’en parfait étranger, dans la plus pure inconditionnalité, par le langage du cinéma.
Une désagrégation où, dans son opposition chimérique à l’animal, l’humain se déconstruit, jusqu’à la mort d’un enfant
Où l’on laisse à voir et entendre que tout film est fondé sur le sacrifice de la femme par des morts-vivant.
En se soustrayant à la logique de l’échange, le Juif perd tout, il est absolument exproprié, y compris de sa propre identité.
« Viens! » dit le lieu sans vérité, sans contenu, qui en appelle aux croyances, aux mouvements, sans les déterminer (Khôra).
Pour se sauver, il faut affronter l’impardonnable.
Perpétuer le deuil comme tel, en jouir, c’est le nier : en s’appropriant les morts, on exerce sur eux pouvoir et souveraineté.
Plus la transgression est excessive, et plus elle reconduit le cycle de la dette.
Il s’agit, sous l’apparence de la transgression, de sauver la distinction tranchée qui oppose le bien au mal.
Au cœur de la plus phallogo-polémo-centrique des comédies, un homme impuissant ressuscite, en paix avec lui-même, après la Cène
Porter à l’excès la logique de l’échange pour faire un pas au-delà, le dernier pas, indifférent à l’échange.
Jouir d’un vol, dans un désintéressement absolu, pour affirmer simultanément, sans les dissocier, son innocence et sa culpabilité.
Quand s’effondrent les limites, les parerga, rien ne peut arrêter la violence originelle, inouïe.
À l’acmé de la violence, du calcul politique qui voue Aldo Moro au sacrifice, se pose la question de l’au-delà du pouvoir, du politique.
Avec la perfection du film muet, convergent l’apologie de l’amour et celle de la beauté adhérente en art.
La paternité n’est pas biologique, mais performative : est père celui dont l’enfant croit qu’il est le père