Megalopolis (Francis Ford Coppola, 2024)
Pour réparer le monde, il faudrait un « saut dans l’inconnu » dont nul ne connaît l’aboutissement; Coppola rêve le meilleur, mais le pire pourrait advenir
Pour réparer le monde, il faudrait un « saut dans l’inconnu » dont nul ne connaît l’aboutissement; Coppola rêve le meilleur, mais le pire pourrait advenir
Quand, dans la plus conventionnelle des histoires d’amour, l’hybride fait irruption, c’est comme chair monstrueuse, maléfique, pulsion de mort, dont il est impossible de se débarrasser
L’écran n’est pas extérieur au corps : il le parasite, le colonise, le soumet, le remplace, y ajoute toujours plus de dépendances et de sensations, et enfin survit à sa mort
Pour transgresser sans limite les lois et normes courantes, la violence nazie prend appui sur une autre violence, familiale, qui laisse libre cours à toutes les perversions
Transformer son identité, brouiller les genres, cela n’efface ni la faute ni la dette, mais cela peut ouvrir, pour d’autres, un « pas au-delà », une épiphanie
L’acteur-voyou, bête de cinéma, pédophile et incestueux, brave les interdits en portant à l’excès les moyens propres du cinéma
En-deçà du désir d’amour usuel, rassurant, un autre amour pourrait faire irruption : archaïque, dangereux, effrayant, catastrophique, et pire encore : aussi vide que la mort
Ce qui reste de paradis (perdu, oublié par les humains) ne survit que par la corruption et la mort, à travers le sang que prélèvent les héritiers (Adam & Eve)
Entre voyeurisme et restitution, préserver la trace hybride de ce qui s’efface, flotte, se transforme, résiste, survit, renait
Une vie entièrement gouvernée par les mécanismes neuro-cognitifs serait absolument déterminée, et par conséquent vouée à l’échec
Il ne suffit pas de vouloir atténuer ses fautes pour accéder au monde du sans-calcul, du sans-condition
Amalgamer les ingrédients les plus usuels du cinéma pour forclore toute interprétation rationnelle.
D’autres regards vivants, angoissés, désespérés, inouïs, inaccessibles, intraduisibles, émergent des marges de la ville.
Il aura fallu, pour entendre le secret dont l’autre témoigne, en passer par un « Je suis mort »
Pour se dégager du monde ruiné, disloqué, détruit, des Indiens d’aujourd’hui, il faut se dissocier du présent, ouvrir des possibilités inconnues, à venir.
En voulant me transformer, je redeviens ce que je suis et son contraire, mon propre pharmakon.
Pour quiconque, il peut arriver qu’une décision souveraine, inconditionnelle, invite à la mutation, la transformation, l’hybridation.
Il faut choisir librement ce qui, déjà, en secret, habite nos rêves.
il y a dans ce film quelque chose de nazi : l’entrée en scène d’un monde absolument dépourvu d’avenir
Notre monde s’efface, s’arrête, ce qui arrive est obscur, inconnu, absolument indéterminé.
Une singulière catastrophe amoureuse, incompréhensible, exceptionnelle et terrifiante, fait advenir une autre alliance, immaîtrisable et inconnue, entre la mort et la vie.
La fille a le droit de se libérer d’une exigence inconditionnelle, absolue, à laquelle le père ne peut pas se soustraire.
Où le cycle de la dette est corrompu, ruiné, asservi aux commerces de la drogue et du cinéma.
À distance de la vie courante, quotidienne, nous attend un événement archaïque, dangereux, catastrophique et pire encore : vide, sans signification ni contenu, une Bête effrayante
Tu répondras à l’autre, dans l’irresponsabilité la plus absolue.
Dans leur bulle, inutiles et irrécupérables, les héros de la scène rock sont plus moraux encore que la moralité.
Un film ne peut se présenter comme réel, virtuel, fantastique ou autre que parce qu’il est indiciel, indicatif
Au cinéma, il est impossible d’interpréter sa propre mort, mais on peut toujours la jouer.
Un monde clos dont les bords ne s’étendent qu’au prix d’une étrange et incontrôlable transformation.
Puisque le monde ne répond plus, je ne peux l’interroger qu’en parfait étranger, dans la plus pure inconditionnalité, par le langage du cinéma.
Une désagrégation où, dans son opposition chimérique à l’animal, l’humain se déconstruit, jusqu’à la mort d’un enfant
Où l’inceste, étranger à la chaîne des dettes et des corruptions, peut sembler réparateur.
Le souverain de banlieue, ce jeune (lionceau) incontrôlable, introduit l’imprévisible, l’incalculable, dans le lieu clos de la cité.
Pour résister aux pulsions de mort, de cruauté, il faut la pure gratuité de l’ornement féminin.
Il faut des femmes imprévisibles, illogiques, irrécupérables, pour créer entre les mondes d’autres liens.
S’ensommeiller, se retirer du monde, renoncer à l’archive, affirmer son unicité pour finalement, enfin, mourir vivant.
Il faut, pour excéder la cruauté, recueillir sa force, la transformer sans rien qui puisse la compenser : ni argent, ni amour, ni gain, ni perte.
Pour s’emparer des possessions des hommes, dans son absolue souveraineté, la femme laisse libre cours à ses pulsions, y compris épistémiques
Il suffit d’une goutte de sperme pour que s’efface la fiction d’une appartenance pure, indéniable.
« Viens! » dit le lieu sans vérité, sans contenu, qui en appelle aux croyances, aux mouvements, sans les déterminer (Khôra).
En disparaissant, elles suspendent le monde dans lequel le film s’inscrit – sans laisser aucun indice sur l’autre monde.
Je dois, pour sur-vivre, me dépouiller de tout ce qui m’appartenait : identité, culture, personnalité, profession, croyances, etc.
On peut pallier, par l’œuvre, la perte d’un regard unique, irremplaçable.
Faire payer à l’autre l’écart entre survie et sur-vie.
Accueillir l’étranger, c’est ce qui peut déclencher la haine la plus insensée, le rejet le plus délirant.
Le cameraman le plus crédible, le plus digne d’amour, c’est celui qui filme pour rien, sans projet ni intention (le singe).
Il vaut mieux accompagner, porter, l’inarrêtable hybridation du monde.
Il n’y a rien à attendre de la différence des sexes.
Le premier film parlant a pour thème la dissociation voix/corps/identité; il voudrait faire croire à leur coïncidence, si elle était possible.
Pour devenir soi, unique entre tous, laisser venir l’hybride dans son corps.
Il faut, quand le phallocentrisme se désagrège, « rester vertical » sans la prothèse d’une érection, sans le prétexte d’un ordre social.