Ready Player One (Steven Spielberg, 2018)
Un film ne peut se présenter comme réel, virtuel, fantastique ou autre que parce qu’il est indiciel, indicatif
Un film ne peut se présenter comme réel, virtuel, fantastique ou autre que parce qu’il est indiciel, indicatif
Ne craignez pas les catastrophes, car nous sommes protégés par une immunité quasi-miraculeuse, qui tombe directement du ciel.
Au cinéma, il est impossible d’interpréter sa propre mort, mais on peut toujours la jouer.
Avec le nazisme, il n’y a plus ni père ni fils, ni mère ni enfants, mais une seule chair qui ne peut que vivre et disparaître en même temps.
Dans l’univers vide des lieux communs où tout et n’importe quoi peut être dit, il peut surgir de l’inattendu, de l’imprévisible, du nouveau.
Par sa voix, la chanteuse baroque réunit la vie, la mort, et l’au-delà de la vie, au-delà de l’être, plus que la vie.
Il aura fallu, pour que le fils prenne la place de l’antéchrist, carboniser le père, décapiter les femmes, réduire le logos en cendres.
Les seuls amis qui me restent sont ceux qui ne répondent pas.
Quand disparaît la prophétie, l’espoir d’un monde à venir, alors disparaissent avec elle l’accueil de l’autre, l’hospitalité, la fraternité.
En associant le long du fleuve les lieux fragmentés de la dette, de l’économie et de l’échange, on appelle une autre unité, une autre éthique.
Tragi-comique, scandaleux, imparable et inéluctable, l’événement sacré qui fait de Dieu une femme.
Par la grâce d’une amnésie purificatrice qui annule les fautes, innocente, immunise du passé – on peut recevoir le pardon.
Une désagrégation où, dans son opposition chimérique à l’animal, l’humain se déconstruit, jusqu’à la mort d’un enfant
Au vivant inconditionnellement étranger à « notre » monde (l’autiste), on ne peut répondre que par l’exception, elle aussi inconditionnelle : « Je dois te porter ».
Dans une vacuité absolue, il cherche en elle un secret inavouable – mais il n’y en a pas.
Il faut un compte juste pour qu’une autre économie, un autre type d’alliance et d’altérité, se mette en place.
Quand le mal radical répond, c’est dans la langue intraduisible d’un sacrifice terrible, inaudible, impardonnable
Il faut préserver le rapport sexuel, car c’est le seul rempart contre un ennui mortel.
Les pleurs du père déchu en deuil de sa culture, sa sophistication, son théâtre, son épouse, son fils et aussi de lui-même, en tant qu’homme, sans rien connaître de ce qu’il adviendra
Une série de pures rencontres, sans autre motif que le plaisir et le sexe, n’a pas d’autre horizon que la mort.
Il n’y a pas de limite au parasitage, pas de ligne protectrice qui ne puisse être franchie.
« Il faut œuvrer », à condition que l’orientation choisie reste suspendue à l’indécision ».
Une relation quasi-incestueuse, non dite, met à l’épreuve les identités, déstabilise les généalogies, brouille les relations.
Pour accéder aux souvenirs, il faut pousser toujours plus loin le mouvement de la mimesis, multiplier les dédoublements.
Monstrueuse la tragédie d’un fils naturel dont on attend qu’il assassine une mère déjà morte, un père déjà suicidé, au prix de sa vie.
Où l’inceste, étranger à la chaîne des dettes et des corruptions, peut sembler réparateur.
S’arrêter sur le pont qui mène au fantasme, au rêve, en passant par la photographie.
Sexe et pouvoir, à l’état nu, exhibent sans fard leur complicité.
En répétant deux fois son nom dans le titre « JLG/JLG », Jean-Luc Godard redouble et redouble et dissémine l’écho de sa propre voix.
Au-delà de tout calcul, une promesse d’amitié peut enjamber deux siècles.
L’argent-voyou, qui semble exonéré et exonérer de toute dette, appelle la chance et porte la malédiction.
Jamais les excuses ni les regrets ne seront à la hauteur du mal fait.
S’ensommeiller, se retirer du monde, renoncer à l’archive, affirmer son unicité pour finalement, enfin, mourir vivant.
Il faut, pour faire son deuil, spectraliser le mort, car porter un cadavre en soi, avec soi, est mortifère ».
Il faut, pour excéder la cruauté, recueillir sa force, la transformer sans rien qui puisse la compenser : ni argent, ni amour, ni gain, ni perte.
L’alcool peut aussi, parfois et sans prévenir, se faire pharmakon.
Pour faire un couple comme pour faire un film, il faut multiplier les deuils, porter les endeuillés.
Pour s’emparer des possessions des hommes, dans son absolue souveraineté, la femme laisse libre cours à ses pulsions, y compris épistémiques
Les pères s’effacent, plus rien ne soutient les fils, il n’y a plus ni sujets, ni amis, ni amants.
À tout ce qu’on voulait faire de moi, j’ai acquiescé, mais on ne peut pas m’empêcher de dire « je ».
Pour qu’advienne le « oui », il faut se laisser aller à un cheminement vide, vacant, et implorer.
Il faut, pour vivre, faire son deuil de l’amour d’avant l’amour, l’archi-amour.
Refuser la peine de mort exige un engagement inconditionnel démesuré, illimité, incompatible avec quelque transaction que ce soit.
Il aura fallu dire « Je suis mort » pour que commence la vie en plus, la vie supplémentée par l’œuvre, plus que la vie.
L’amour (quasi-)incestueux est le seul qui, au coeur du continent noir, soit vraiment digne de ce nom.
Il suffit d’une goutte de sperme pour que s’efface la fiction d’une appartenance pure, indéniable.
Derrière le regard circulaire du système des médias, il y a des pleurs – impossibles à cacher, étouffer, réprimer, arrêter, surmonter.
Principe d’hospitalité : « Je voudrais apprendre à vivre, enfin ».
S’auto-punir en s’emparant, par un geste de cruauté impardonnable, de la poupée perdue d’une petite fille abandonnée.
On ne peut pas se préparer à la mort, tout ce qu’on peut faire, c’est en exiger toujours plus, plus encore que la vie.
Dans un film-cauchemar, la petite fille se retire après avoir payé le prix des blessures, des cicatrices, des souffrances que les autres se sont infligées.
Est star celui qui peut mourir sans mourir, faire du cinéma sans faire du cinéma, signer un film en le déconstruisant.
Mourir déjà mort (ou presque), sans laisser de trace, altère la possibilité du deuil.
Insensible, muette, masquée, sans cause ni raison, la figure du mal s’en prend prioritairement à sa propre famille.
On ne peut espérer communiquer avec un mort qu’à travers un dispositif de mémoire, un artefact, mais c’est impossible, ça ne marche pas, le récit reste inachevé.
Un désir unique, singulier, déclenché par la rencontre improbable, indécise, de deux solitudes.
D’où reviennent les morts, au-delà de l’être, c’est là qu’il faut aller.
En laissant à la femme silencieuse son lieu, son pouvoir, on peut se dégager des rôles, des stéréotypes sexuels et sociaux.
Il faut garder l’avenir ouvert, sans préjuger de ses conséquences ni s’enfermer dans une définition préalable du bien et du mal.
« Il faut que je te porte », dit la terre, et tu répéteras le cycle.
« Il faut que je te porte », pour que tu m’ouvres les yeux.
En espérant que d’une pure intériorité, dans les limbes réticulaires de l’apocalypse, quelque chose pourra surgir.
Pour un homme, faire jouir une femme est un plaisir sans limite; on peut tout donner pour cela, y compris son sexe, sa vie
Il aura fallu qu’elle soit réduite à la fixité d’un portrait, prise pour morte, pour qu’elle rencontre enfin l’homme pur, intègre : le policier.
Je regarde, depuis ma cachette, ce monde à la veille de sa disparition, puis je passe le témoin à un autre, sans le porter
Quand la mise en acte d’une justice inconditionnelle, non négociable, appelle une solidarité sans réserve.
En disparaissant, elles suspendent le monde dans lequel le film s’inscrit – sans laisser aucun indice sur l’autre monde.
Il vaut mieux, pour se dégager du deuil, choisir le pas de côté qui éloigne du réel.
Notre monde s’effondre, il n’y a personne pour nous porter et nous ne savons pas nous porter nous-mêmes.
Un film, dans le film, révèle une vérité dont il témoigne par le montage.
Je dois, pour sur-vivre, me dépouiller de tout ce qui m’appartenait : identité, culture, personnalité, profession, croyances, etc.
Perdre un monde suppose de renoncer aussi à une part de soi , un quasi-suicide qui conditionne la possibilité de continuer à vivre.
Incapable de demander pardon, de renoncer à la perversion, elle choisit le vide, la déchéance, l’anéantissement.
Tenter de réunir des fraternités irréconciliables sans les contester de l’intérieur conduit à la paralysie, la tragédie, l’autodestruction.
Il s’agit, sous l’apparence de la transgression, de sauver la distinction tranchée qui oppose le bien au mal.
Une virginité toute autre, d’avant toute virginité.
Déliée de toute dette, elle reste paralysée au bord de l’inconditionnel.
Je renonce à suivre les commandements de la société, du père, pour devenir ce que je respecte vraiment : un nom unique, irremplaçable, et rien d’autre.
« Je suis mort » ne peut se dire que dans une langue toute autre, intraduisible.
Il faut, dans ce monde dangereux, apprendre à s’engager, prendre tous les risques.
À une exigence de fidélité venue d’ailleurs, des ascendants ou d’Afrique, on ne peut répondre que par un sacrifice, ou à défaut en pleurant.
Vivre sous la contrainte d’un devoir d’amour, un archi-amour indéterminé, insaisissable.
Archi-amour : ce sont tes dettes que j’acquitte, sans condition ni justification, au bénéfice d’un tiers.
Dans le secret de la crypte, l’amour inconditionnel conduit à l’auto-sacrifice, au retrait, au salut.
Comment s’emparer d’une femme, la posséder par son secret, la garder par sa guérison – et surtout dérober son monde.
L’instant pour moi le plus décisif, celui dont je désire le retour avec le plus d’intensité, c’est celui de « ma mort », dont je me souviens sans l’avoir vécue.
Un pouvoir uniquement fondé sur l’affirmation charismatique de soi-même se met dans la dépendance absolue d’autrui.
Ce qui reste silencieux ne peut s’écrire que dans une langue étrangère, intraduisible.
Une grand-mère pour toujours sur le point de mourir, sans jamais franchir le pas.
Il aura fallu, pour commencer à vivre, un avertissement supplémentaire : tu te dois à la mort.
Un parcours dans les marges où la vie courante, sentimentale-économique, se dissout, s’efface, s’éclipse.
Accueillir l’étranger, c’est ce qui peut déclencher la haine la plus insensée, le rejet le plus délirant.
Du seul moment qui compte, la naissance, on ne peut rien dire ni rien se remémorer.